Malgré sa taille modeste, le vignoble genevois produit des vins de qualité. Le niveau des exportations de La Cave de Genève ne cesse de progresser. Les explications de ce succès avec Martin Wiederkehr, directeur général de La Cave de Genève.
La Cave de Genève réalise une véritable performance tant sur le marché intérieur qu’à l’export, à quoi attribuez-vous ces résultats?
Je tiens à saluer le travail des vignerons, c’est grâce à leurs efforts consentis depuis maintenant plus de 20 ans que nous sommes en mesure de proposer des vins de qualité premium. C’est la condition sine qua non pour se faire une place au sein du marché mondial. Notre vignoble s’étend sur 15 000 ha soit à peine la surface du vignoble alsacien, autrement dit nous ne pouvons miser que sur la qualité exceptionnelle de nos produits puisque nous ne pourrons jamais lutter sur la quantité. Nous disposons en Suisse des meilleurs œnologues et de viticulteurs très performants, mais, de par notre culture, nous avons encore du mal à vanter les qualités de nos vins. Par excès de modestie, sans doute.
La consommation annuelle par an et par habitant tend à diminuer d’année en année, pourtant vous ne cessez d’augmenter vos ventes, quel est votre secret?
Le vin fait partie intégrante de notre culture et même si la génération des 18 à 25 ans s’en détourne, nous constatons qu’aux alentours de la trentaine, une fois installés dans la vie, mariés, devenu parents, les jeunes reviennent naturellement vers ce qui contribue à cimenter nos valeurs. Nous ne parlons pas que d’alcool, mais de bien plus que cela. C’est la convivialité, le plaisir partagé et la connotation produit de luxe qui séduisent.
Ajouté à cela que les générations des plus de 50 ans restent majoritaires en Suisse. Il s’agit d’une population qui dispose de moyens financiers confortables et qui reste très attachée au vin.
En quoi le marché alémanique diffère-t-il des marchés étrangers et adoptez-vous une stratégie commerciale spécifique selon les pays?
Notre credo reste toujours le même, nous mettons en avant l’excellence de nos vins et notre approche reste identique, mais il est vrai qu’à l’étranger nous sommes aussi les ambassadeurs de notre pays. C’est aussi la Suisse que l’on promeut! Quoiqu’il en soit notre stratégie s’appuie d’abord et avant tout sur le marché local. A l’instar d’une pyramide, nous nous appuyons sur une base solide qui nous permet de prospecter le marché régional, national et, enfin le marché international. Toutefois, selon la culture et les goûts des pays démarchés nous adoptons notre offre. Ainsi les consommateurs dans les pays asiatiques apprécient particulièrement les vins blancs doux et liquoreux tandis que les Européens seront plus sensibles aux rouges charpentés. C’est notre rôle d’affiner et de personnaliser nos propositions. Aussi est-il toujours primordial d’aller à la rencontre de nos clients, bien les connaître reste le meilleur moyen de les satisfaire et de les fidéliser.
Quels sont les atouts pour vous démarquer face à la concurrence?
Pour ce qui est de la prospection à l’étranger nous bénéficions de l’excellente image de la Suisse, réputée pour sa rigueur, son exigence et son savoir faire. Genève, l’une des rares villes de Suisse à être mondialement connue, contribue également à nous identifier instantanément. De plus, nous offrons, grâce à la diversité de nos terroirs malgré une surface relativement réduite, un choix très large parmi une vingtaine de cépages qui nous permet de satisfaire tous les goûts ou presque. Nous mettons aussi l’accent sur la communication et la promotion. Ainsi, par exemple, nous participerons au prochain championnat d’Europe de football des vignerons qui se déroulera à Loèche-les-Bains du 21 au 24 mai prochain. Cette compétition organisée tous les deux ans confronte les équipes de six pays uniquement composées de vignerons.
Comment envisagez-vous l’avenir?
Nous avons entrepris un travail de longue haleine et c’est probablement mon successeur, voire le suivant qui récoltera les fruits de nos efforts actuels, je n’en ressens pourtant aucune amertume parce que je suis foncièrement convaincu de l’efficacité du travail d’équipe. Nous exportons aujourd’hui 2,5% de notre production et l’objectif d’atteindre 5% d’ici 2020 me semble à notre portée. Je suis donc confiant et serein pour les années à venir.
Y-a-t-il une carte de restaurant prestigieux sur laquelle vous rêvez de voir figurer vos meilleurs crus?
C’est une question que je ne me suis jamais posée, bien loin de mes préoccupations. Comme je vous le disais, je suis adepte du travail d’équipe et collaborer avec de grands chefs tels que Philippe Chevrier, qui est même devenu un ami personnel, pour promouvoir de concert la gastronomie et les vins me séduit davantage.
Propos recueillis par Frédéric Finot
Photo: Martin Wiederkehr, directeur de la Cave de Genève. / © DR