Oubliés, parfois viscéralement détestés, certains légumes d’autrefois font un retour remarqué dans les assiettes.
Tout a commencé avec le retour du topinambour, exécré des générations de la guerre. La demande s’est d’abord concentrée sur quatre produits – radis noir, panais, rutabaga et topinambour – avant de concerner également le crosne, le cerfeuil et le persil tubéreux.
Le succès de ces légumes est dû aux chefs qui leur ont fait une belle place sur leurs cartes afin de varier leurs plats. Les qualités nutritives de ces légumes ont également participés au regain d’intérêt dont ils sont l’objet.
Un légume oublié est un légume qui n’est plus cultivé, qui est devenu anecdotique, ou qui connaît un lancement incertain. Sa trop faible productivité, la difficulté de sa culture ou le manque d’intérêt sont les principales causes de son déclin. Par ailleurs, le manque d’intérêt du consommateur freine la motivation des agronomes et cultivateurs.
Des légumes venus de loin
Le maceron, à l’état sauvage en Europe du sud, fut cultivé jusqu’au 17ème siècle, pour ses propriétés antiscorbutiques, puis disparut définitivement au profit du céleri. Le chervis de Perse connut le succès au 15ème siècle, puis disparut au 18ème siècle. On pourrait exploiter ses pousses comme des endives, au prix d’un couteux progrès génétique, sans rapport avec les débouchés espérés. Le persil tubéreux est exploité pour sa racine blanche. Il est connu comme légume, depuis longtemps, aux Pays-Bas et en Allemagne.
Le panais, resté populaire en Grande-Bretagne, connaît un nouvel engouement, dû aux applications culinaires développées par les restaurateurs. Le crosne, originaire de Chine, connut, en Europe, un développement intéressant entre les deux guerres mondiales, puis faillit disparaître, dans les années 70, devenu trop peu productif, à cause de virus. La régénération de l’espèce a permis son retour dans nos assiettes. Si le cerfeuil tubéreux pousse à l’état sauvage en Europe centrale, sa culture reste confinée, malgré des qualités reconnues. Type même du légume oublié, il est difficile à cultiver en raison de sa nature complexe.
Le contexte médiatique favorise les légumes oubliés. Cependant, leur réémergence doit être raisonnée, au regard de l’intérêt économique qu’ils doivent engendrer dans toute la filière.
La production mesurée
Le consommateur souhaite utiliser les légumes oubliés sous forme de crudités plutôt que cuits et sans préparation fastidieuse. Il attend aussi de ces légumes une richesse en arômes, un apport conséquent en fibres ou en vitamines et un faible apport calorique.
L’intérêt de l’agriculteur exige un rendement satisfaisant, proche de celui des légumes courants, et un coût de production conforme aux critères d’achat de la distribution.
Le succès commercial d’un légume oublié sera donc en fonction de la performance génétique du légume ou de sa perception. Elle dépendra des efforts pour en éliminer les handicaps et des moyens accordés à l’information du consommateur. La réussite passe par une structure de la filière, au plan national et, plus encore, au plan européen.
JF Ulysse
Photo: Peu caloriques, les crosnes sont des légumes d’hiver riche en sels minéraux et en protéines. / © helenedevun – Fotolia.com